vendredi 29 avril 2016

Micropterus dolomieu, celui qui se bat

Je vous replonge dans le passé pas si lointain de l'été 2015. 6 juillet, midi tapant, je me décidai de dénicher le premier poisson à avoir mordu à mon hameçon : L'achigan à petite bouche. Un poisson vif, vorace, agressif et combattant. At-Chi-Gane, le nom algonguien le dit : Celui qui se bat. Mâchoires fortes, corps taillé pour la puissante brute, l'achigan à petite bouche affectionne les eaux de notre réseaux hydrique, pour mon plus grand plaisir. Déjà, à 8 ans, avec mon père et mon frère, sur le lac Davignon à Cowansville, j'eus le bonheur de connaître ce résidents de nos eaux et il m'avait laissé grande impression, arrachant presque la canne de mes mains inexpérimentées.

Le 6 juillet donc, par une journée d'été splendide, je m'attaquai encore une fois à la Yamaska sud-est, juste en amont du lac Davignon. Je ne m'y attendais pas, mais je marchai plus de 7 heures dans les eaux limpides et fraîches de cette portion de la rivière. Le fond de celle-ci offre un habitat parfait au Micropterus, avec ses rapides aux rochers submergés, ses berges flanquées de souches entremêlées et ses enchaînements plat-rapides-fosse. Je venais de me procurer un niveau modèle de streamer; un Woolly Bugger numéro 8 vert olive. C'est la seule mouche dont je me suis servie ce jour-là, tellement elle s'avéra efficace. En fait, il me fallu la changer pour une autre identique, la première ayant été détruite par les attaques violentes des achigans.

Vue de la rivière sur la Grange-Ronde de West-Brome, chemin Scott


Ce fût une frénésie. Presque chaque lancé donna lieu à une éclaboussure et un combat endiablé. Il faut dire que l'achigan à petite bouche est un expert des vols planés, il y a en même un qui sauta hors de l'eau à une hauteur de 4 pieds! Au total, j'en pris une trentaine ce jour-là, les remettant bien sûr tous à l'eau. Cependant, deux d'entre eux retinrent mon attention de façon plus particulière; deux énormes bêtes. 

Bel achigan pris à l'ombre des conifères

Après un tournant de la rivière, à environs 30 minutes de marches du pont où je commence ma pêche, je savais l'existence d'une fosse assez large et profonde, suivant un long rapide et bordée d'une zone moins profonde, juste avant une petite cascade. J'avais déjà pris des achigans à la mouche à cet endroit et comme la journée était très prometteuse, j'avais confiance. Ce qu'il y a de merveilleux avec cet endroit, comme sur toute la rivière d'ailleurs, c'est qu'on voit tout ce qui se passe sous l'eau, jusqu'au fond, avec le truchement des lunettes polarisées. Il y avait dans la fosse une dizaine de grosse carpes bien grasses, qui n'ont jamais eu cure de mes offrandes. Je les regardai toute de même, comme hypnotisé par leur ballet incessant. 

Soudain, une ombre apparue au fond de la fosse. À sa vitesse de déplacement, j'étais sûr qu'il ne s'agissait pas d'une carpe. C'était le poisson que je convoitais, un achigan de 4 livres. Je dégainai et lui présentai ma mouche plusieurs fois, espérant attirer son attention. Je m'attendais à un malheurs, mais le léviathan du jour se saisi du streamer d'un coup de gueule rapide et désintéressé. C'est lorsque je ferrai que la bête s'anima. Quelle force! Des sauts, des coups de têtes, de queues! Elle semblait inépuisable. Je vis que mon hameçon s'était logé juste sur le bord de sa lèvre et je compris que je ne devais pas lâcher la tension d'un iota, sous peine de voir filer mon adversaire. Après une dizaine de minutes de pugilat pour l'épuiser, je remontai vers la zone moins profonde de la rivière pour prendre et photographier le superbe poisson. C'est là que le malheurs advint. En voulant le prendre par la gueule, je m'approchai, relâchant ainsi l'emprise de l'hameçon sur sa mâchoire et, d'une seul coup de tête, l'achigan se libéra et repartit peinard vers la fosse.  

Les achigans de cette taille sont des plus vigoureux lors du combat
En premier lieu, une incrédulité et une déception intense m'envahirent. Je la partageai même avec mon ami Boisvert au téléphone. Je me comptai tout de même chanceux d'avoir ferraillé avec un adversaire de la sorte, un vrai «diesel» d'achigan. 

Continuant ma route en remontant le courant, j'eus une deuxième chance de soulever un achigan de grande taille (enfin, pour cette rivière). Juste sous le pont du chemin de fer, à 45 minutes de marche de la précédente fosse, une fente s'est formée au fond de la rivière; Un repère de prédateur. Je me précipitai, peut-être un peu trop et ce faisant, je fis déguerpir tout ce qu'il avait de poisson au fond. Dans leur fuite, j'aperçu un autre              « monstre » et comme la journée était encore jeune, je me promis de le prendre au retour. Après un aller d'environs 3 heures (et une vingtaine de prises), je démarrai le retour, avec en tête, le fantôme sous le pont. 

Je dois l'avouer, je piquai à travers champs pour sauver du temps, tellement j'étais pressé de le retrouver. Arrivé sur place, je le vis, rôdant près des piliers de métal, cet autre léviathan. Un seul lancé suffit et un combat de même type que le premier s'enclenchât. Après quelques sueurs froides, de peur de le voir filer entre les piliers et les débris et ainsi casser la ligne, je ramenai le poisson au près de moi. Il se laissant prendre sans artifice celui-là et je savourai le moment qui mis un terme à une mémorable partie de pêche à vue. J'avais peine à le soulever, tellement mon bras était éreinté de temps de lancés et de prises. Quelle magnifique journée sur la Yamaska.

Mon « Léviathan » de 3,5 livres

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